INTERVIEW : Lauryne, le déclic de l’engagement

À quoi ressemble l’éducation à la citoyenneté mondiale quand on la vit de l’intérieur ? À travers cette série de portraits, partez à la rencontre de celles et ceux qui font vivre l’ECM au quotidien. Leurs parcours singuliers, leurs engagements, leurs regards éclairent un mouvement vivant et multiple : e-graine. En mettant en lumière la diversité de ces visages, nous vous invitons à découvrir une autre façon de voir le monde, et peut-être, à prendre part à l’aventure. Aujourd’hui, nous vous présentons Lauryne Blot, chargée de projets éducatifs chez e-graine Nouvelle-Aquitaine.
Peux-tu te présenter et nous parler de ton parcours ?
Moi, c’est Lauryne Blot, j’ai 24 ans. Mon parcours universitaire a débuté par une licence en administration économique et sociale, un choix assez large parce que je ne savais pas encore vraiment où j’allais. Petit à petit, j’ai compris que j’avais envie de projets coopératifs, ce qui m’a menée vers un master en gestion de projets européens. J’ai choisi la spécialisation “expert·e en projets européens au service du développement local”, avec un socle commun autour des enjeux sociaux et environnementaux, portée par mon envie de voyager mais aussi par mon intérêt pour les projets de territoire et le lien entre acteurs locaux. Sans le savoir, j’avais déjà une attache particulière aux thématiques qu’on défend ici, chez e-graine.
Comment as-tu rencontré e-graine ?
Après mon master, j’ai été embauchée pour 6 mois en tant que chargée de projets européens. Je bossais sur des projets européens avec de grosses enveloppes de financement, principalement sur la protection des ressources marines. C’était en lien direct avec mes études, mais je sentais qu’il me manquait quelque chose : j’avais besoin de plus de terrain, de retrouver mes valeurs au quotidien.
C’est en m’engageant bénévolement au Lieu-Dit, une asso brestoise qui agit pour les transitions locales, que j’ai eu un vrai déclic. Je m’épanouissais bien plus dans mon engagement que dans mon travail. Je me suis dit : « Et si je faisais ça professionnellement ?«
Et puis je suis tombée sur l’offre chez e-graine. « Chargée de projets pédagogiques » : un poste qui rassemblait tout ce que j’aimais : la gestion de projet, les thématiques citoyennes et locales. J’ai terminé mon contrat à Brest, et trois jours plus tard, je commençais à Bordeaux.
D’autres facteurs ont-ils motivé ton engagement, au-delà de cette expérience ?
Oui, je pense que c’était aussi une remise en question globale. Tu fais des études parce qu’on t’a toujours dit « fais des études, tu verras, ça t’ouvrira des portes, ça sera un travail où tu gagneras bien ta vie, tu seras heureuse ».
Et puis tu arrives dans ton premier travail, et là tu te dis : « Mais en fait, ce n’est pas exactement ce que je veux. » Et ça pousse à réfléchir : est-ce que je veux continuer comme ça ? Est-ce que je me suis posée les bonnes questions ? Est-ce que j’ai fais les bonnes études ?
Moi je me suis dit : j’ai envie de mettre mon énergie à faire quelque chose qui me plaît, qui a du sens et qui correspond à mes valeurs dans toutes les sphères de ma vie ! C’était un vrai virage personnel et pro.
Quel est ton rôle chez e-graine Nouvelle-Aquitaine aujourd’hui ?
Je suis chargée de projets pédagogiques au sein d’e-graine Nouvelle-Aquitaine. J’ai deux casquettes principales. La première, c’est d’être en charge d’un projet de participation citoyenne sur le quartier des Aubiers à Bordeaux, autour de la thématique des déchets. L’idée, c’est de permettre aux habitant·es de se réapproprier leur quartier, de s’y sentir bien, tout en travaillant sur une problématique forte du quartier : les déchets. Et ma deuxième casquette, c’est la mobilisation citoyenne (la mobilisation citoyenne, c’est fédérer les citoyens autour de son projet associatif et les accompagner à le porter, à travers des actions bénévoles, l’adhésion par exemple). Pour cela, je coordonne l’organisation d’événements grand public, l’animation d’ateliers sur l’alimentation ou la consommation responsable ou encore des ateliers pour découvrir ce qu’est l’Éducation à la Citoyenneté Mondiale. Je m’occupe aussi de l’accompagnement et de la coordination du groupe de bénévoles : une dizaine de personnes qui participent à nos actions.
Pour toi, l’Éducation à la Citoyenneté Mondiale, c’est quoi ?
L’Éducation à la Citoyenneté Mondiale, pour moi, c’est tout ce qui nous permet de nous sentir appartenir à un monde commun. C’est partir du principe qu’on n’avancera qu’ensemble. Peu importe la thématique à laquelle on touche, l’environnement, l’alimentation, la solidarité, etc., on est tous concerné·es. Il faut prendre en compte les réalités de chacun·e, et c’est en faisant ça qu’on arrive à construire quelque chose de global. On va plus loin quand on avance à plusieurs.
Tu aurais un exemple concret d’action qui t’a marquée ?
Oui ! On a organisé une formation pour des agent·es de restauration de Bordeaux Métropole, dans plusieurs communes. L’objectif, c’était de parler du développement du goût chez les enfants, et de l’alimentation saine et durable. Ce qui m’a marquée, c’est que c’était des personnes de différents établissements (maternelles, primaires, collèges) qui, dans leur quotidien, avaient peu l’occasion d’échanger sur leurs pratiques. Là, grâce à la formation, on a créé un vrai espace de discussion. Ils ont réalisé qu’ils vivaient les mêmes problématiques, et juste en quelques heures, une personne a dit : « Moi, pour limiter le gaspillage, je propose petite faim / grande faim. » Quelques jours plus tard, pour la deuxième partie de la formation, quelqu’un l’avait mis en place dans sa cantine, et ça marchait super bien !
Et surtout, au début de la formation, quand on leur demandait s’ils se considéraient comme éducateur·rices à l’alimentation, ils répondaient tous·tes : « Non, on est juste là pour servir. »
Mais à la fin, un agent nous a dit : « Mais du coup, j’ai envie qu’on change mon intitulé de poste et qu’on mette : Éducateur·rice à l’alimentation et au goût” ! »
C’était hyper fort. Ça a permis de revaloriser des personnes qui ont un vrai rôle éducatif. C’est exactement ce que j’aime dans nos actions : voir que les gens prennent conscience de leur impact.
Quel serait ton « rêve » de mobilisation ?
Mon rêve, ce serait de réussir à faire naître des déclics dans la tête des gens. Créer une étincelle chez quelqu’un, lui montrer que ses actions comptent, que ce soit à titre personnel ou professionnel.
Je pense que tout part d’un petit déclic, comme celui que j’ai eu à la sortie de mes études.
Et j’ai envie de transmettre ça : dire aux gens qu’ils ne sont pas seul·es, qu’il existe des collectifs, des associations, des espaces pour agir.
Et que chacun·e peut trouver la forme d’engagement qui lui correspond, sans chercher à faire exactement « comme il faut ». Chez e-graine, on est un peu là pour accompagner ça : aider à oser, à croire en la force de ses actions, qu’elles soient individuelles ou collectives.
Quelle action individuelle ou collective pourrait, selon toi, avoir le plus d’impact ?
Je dirais : trouver une cause qui te touche, une cause qui te fait vibrer.
Un truc qui te réveille un peu de l’intérieur, tu vois ? Et là, tu mets ton énergie dedans, à fond. Je suis convaincue que tout le monde peut avoir ce déclic.
Et l’éducation populaire joue un rôle énorme là-dedans : elle permet d’exprimer ses ressentis, de poser des mots, de prendre conscience… et d’agir avec le coeur.
Ton meilleur souvenir terrain chez e-graine ?
La deuxième édition de la fête de la propreté, dans le quartier des Aubiers. Quand je suis arrivée en avril, j’ai repris le projet. L’idée, c’était de travailler à l’organisation d’un évènement sur le quartier avec un groupe d’habitant·es du Conseil Citoyen sur la thématique des déchets.
La première édition portait sur les déchets volants, la deuxième sur les encombrants — un problème très présent dans le quartier. Pour cette deuxième édition les habitant·es ont tout co-construit : affiches, signalétique, communication… Ils ont même peint des panneaux à la main pour indiquer les points de collecte. Le jour J, peu de gens ont déposé leurs encombrants spontanément… mais quatre ou cinq habitant·es se sont dit : « Allez, on fait le tour du quartier et on les ramène nous-mêmes sur la place ! »
La journée s’est finie avec un concert sur la place centrale avec l’artiste Alt Blaq.
Bon, petite galère : on pensait pouvoir se brancher dans le quartier pour le son… mais il n’y avait pas de prise. Résultat : quelqu’un connaissait la pharmacienne, et hop, on s’est branchés là-bas. Quelques petits imprévus qui ont pu être résolus grâce à la force du collectif !
Ton meilleur souvenir terrain chez e-graine ?
J’adore cette question ! Je sais pas comment elle s’appelle, mais c’est une chanson dans Les Gardiens de la Galaxie. Celle où Baby Groot danse, et derrière lui, c’est un chaos total. Cette scène, je la trouve géniale. Mr. Blue Sky de Electric Light Orchestra, parce qu’elle te dit que, même si t’es tout petit, même si autour tout part dans tous les sens, tu peux quand même faire ta part, et ça compte.
C’est une musique hyper entraînante, un peu comme l’énergie qu’on a chez e-graine : parfois, c’est dur, mais y’a toujours une flamme, un truc qui te pousse à y croire, à y aller.
Un grand merci à Lauryne pour son témoignage, son engagement et son sourire !
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